Bitcoin et la théorie des jeux

En Europe, je ne connais aucun média économique qui présente Bitcoin autrement qu’à travers l’unique prisme de la « bulle spéculative » ou de « l’absence de valeur intrinsèque ».

La chronique économique d’Amid Faljaoui de ce 3 décembre 2024 va toujours dans ce sens. Intitulée « Gainsbourg, le Bitcoin et la banane à 6 millions de dollars« , elle associe Bitcoin avec l’art spéculatif et excentrique. Cette chronique m’a inspiré la réponse suivante.

Si, après coup, par exemple dans deux ans, l’adoption de Bitcoin paraissait évidente et inévitable, alors mieux vaut ne pas être parmi les derniers à reconnaitre cette « évidence », surtout quand on travaille à l’intersection des domaines de la finance et des nouvelles technologies.

Au fil du temps de farouches et célèbres détracteurs de Bitcoin en sont devenus de fervents défenseurs.

Larry Fink, PDG de BlackRock, est passé de sceptique à promoteur actif, lançant un fonds dédié au bitcoin. De même, Donald Trump, ancien et futur président des États-Unis, a évolué d’une critique sévère à un soutien affirmé du Bitcoin. Le président Vladimir Poutine a signé tout récemment une loi légalisant le minage de bitcoin et introduisant une fiscalité spécifique, reconnaissant bitcoin comme un bien.

On ne peut pas dire que ces trois personnalités agissent sans avoir été conseillées, et sans avoir analysé la « valeur intrinsèque » du système Bitcoin.

Ajoutons à cela d’autres initiatives gouvernementales concernant le Bitcoin.

Par exemple, aux États-Unis, la sénatrice Cynthia Lummis qui a proposé la création d’une réserve stratégique de bitcoin, suggérant que le Trésor et la Réserve fédérale acquièrent un million de bitcoins sur cinq ans. L’initiative du Brésil où un projet de loi propose aussi la création d’une Réserve Stratégique Souveraine de bitcoin pour diversifier les actifs financiers du pays. Ou celle du Bhoutan, ce royaume himalayen qui a discrètement investi dans le minage de Bitcoin, utilisant son énergie hydroélectrique pour exploiter des fermes de minage. Sans oublier le Japon où le bitcoin est légalement reconnu comme moyen de paiement depuis 2017, et plusieurs entreprises acceptent les paiements en bitcoin. Il y a également la Suisse, où le canton de Berne étudie la possibilité de se lancer dans le minage de Bitcoin, considérant cette activité comme une opportunité pour accélérer la transition écologique. Et évidemment le Salvador qui utilise officiellement le bitcoin comme monnaie légale (depuis 2021) à côté du dollar américain. En Chine, des décisions judiciaires récentes ont reconnu le statut de propriété des bitcoins. Par exemple, un tribunal de Shanghai a statué que le bitcoin est une « marchandise virtuelle » avec des attributs de propriété, ce qui signifie que la possession de bitcoin est légale et protégée par la loi chinoise. Cette reconnaissance juridique permet aux détenteurs de bitcoin en Chine de bénéficier de protections légales en cas de litiges, tels que le vol ou la violation de contrats liés aux bitcoins.

Par ailleurs, l’adoption du bitcoin par des entreprises comme Tesla, Microstrategy et beaucoup d’autres plus discrètes montre que de nombreux acteurs institutionnels considèrent le Bitcoin comme un actif sérieux et non comme un simple pari financier.

Sommes-nous vraiment plus malins en Europe en continuant, depuis 15 ans, à considérer Bitcoin comme une bulle spéculative, quelque chose de peu sérieux auquel il est excentrique de croire ?

Comment ne pas passer à côté de cette « évidence très probable » qu’est le Bitcoin ? Comment ne pas continuer à considérer Bitcoin comme une hystérie passagère, une simple euphorie spéculative et une chose sans valeur intrinsèque ? Comment ne pas continuer à faire un amalgame entre Bitcoin et les multiples « crypto monnaies » fragiles ?

A ces questions, ma réponse est : en consacrant quelques heures à étudier Bitcoin en dehors des médias (trop) traditionnels.

Pour se faire, je recommanderais trois lectures.

D’abord le « white paper » intitulé « Bitcoin: A Peer-to-Peer Electronic Cash System » et qui ne comporte que 9 pages. Il est toujours bon de partir de la source originale qui se trouve facilement sur Internet.

Ensuite « Broken Monney: Why Our Financial System is Failing Us and How We Can Make it Better » de Lyn Alden, qui pourrait être intimidant avec ces 538 pages, mais pas pour vous !

Enfin, « Softwar: A Novel Theory on Power Projection » de Jason Lowery, est une thèse du MIT qui ouvre d’autres portes et surtout qui avait été censurée par le Pentagone. Ce qui en fait un ouvrage dont la lecture est indispensable. Une copie numérique peut être obtenue gracieusement au MIT : https://dspace.mit.edu/bitstream/handle/1721.1/153030/lowery-jplowery-sm-sdm-2023-thesis.pdf

Il y a bien entendu d’autres livres très pertinents et intellectuellement plus abordables mais ne perdez plus de temps, allez à l’essentiel.

Enfin, réaliser que si les supers puissances que sont les Etats Unis et la Russie se positionnent maintenant en faveur du Bitcoin, c’est qu’il existe plus que probablement un intérêt à le faire !

Le plus intéressant réside dans l’ouverture totale du Bitcoin : tout individu peut y adhérer ou l’ignorer mais la théorie des jeux nous dit qu’il vaut mieux y adhérer tôt que tard.

La théorie des jeux montre que, dans un environnement où les bénéfices augmentent avec l’adoption collective, il est rationnel pour les acteurs de chercher à adopter tôt le Bitcoin. L’adoption tardive, bien que possible, entraîne des coûts plus élevés, un potentiel de bénéfices réduit et un risque d’exclusion stratégique. Cela explique pourquoi de nombreux individus, entreprises et même certains gouvernements envisagent de s’engager dès maintenant dans l’écosystème Bitcoin.

Dans sa nouvelle chronique du 18 décembre 2024, Amid Faljaoui nous dit que « Donald Trump est en train d’organiser le plus grand casse du siècle en mettant l’argent du contribuable américain au service des détenteurs de cryptomonnaies y compris ceux qui vivent en Belgique ou en France…« . S’il s’agit vraiment du « casse du siècle » annoncé plusieurs semaines avant d’être perpétré, pourquoi ne pas en profiter ? Tout cela ne fait que confirmer le principe de la théorie des jeux…

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Les cryptomonnaies sont le futur de nos monnaies

Ce 14 février 2019, une grande banque américaine, JPMorgan, annonce la prochaine mise en service de sa cryptomonnaie : le JPMorgan Coin. Le but est de simplifier les transactions des gros clients de la banque. Mais seuls les clients de cette banque peuvent l’utiliser, ce qui limite considérablement l’intérêt de cette nouvelle cryptomonnaie.

Cependant l’intérêt est plus important qu’il n’y parait. D’abord, le fait que JPMorgan adopte cette voie alors que son dirigeant avait été très virulent à l’égard du bitcoin. Et ensuite, le fait de choisir résolument de la baptiser en tant que cryptomonnaie : « JPMorgan Coin« . Les mentalités évoluent dans le sens d’une adoption des cryptomonnaies.

Pour faire une analogie, le JPMorgan Coin est l’équivalent électronique d’un chèque certifié qui représente donc des dollars sur un compte JPMorgan et payable uniquement dans une banque du même groupe JPMorgan.

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Ether à 230€ : déclin ou opportunité ?

Ce 14 août 2018, l’éther s’échange à 234€ ce qui représente une importante baisse depuis l’euphorie du début 2018 avec plus de 1000€/ETH.

Pourquoi cette baisse et comment peut-on l’analyser ?
S’agit-il d’un déclin irrémédiable ou d’une opportunité pour acquérir des éthers à bon compte ?

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Certification authentifiée via le Blockchain du Bitcoin

Une des applications du Blockchain (la base de données publique et sécurisée du Bitcoin) est de permettre d’authentifier des documents.

L’Université de Nicosie a publié les premiers certificats universitaires dont l’authenticité peut être vérifiée grâce au Blockchain. Ces certificats sont délivrés aux étudiants qui ont suivi avec succès le cours DFIN511 Introduction to Digital Currencies (introduction à aux devises numériques), qui est le premier cours universitaire offert sur le thème des crypto-monnaies.

Certificattion : Univiversity of Nicosia
Certificattion : Univiversity of Nicosia

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Contrats autonomes et applications décentralisées

contrat autonomeActuellement encore futuristes, les contrats autonomes (« smart contracts ») et les applications décentralisées deviennent une réalité avec le développement de systèmes tels qu’Ethereum. Ces systèmes partent des innovations du Bitcoin (qui a permis de se passer de tiers de confiance pour gérer la possession de biens numériques) et vont beaucoup plus loin, par exemple en y intégrant l’automatisation de tâches (via un langage de programmation).

Un contrat autonome s’exécute seul, c’est-à-dire sans aucune intervention humaine. Alors qu’un contrat papier (ou PDF) contient du texte qui servira, en cas de litige, de base à un juge pour ordonner une des parties à faire un transfert financier (ou de propriété) vers l’autre partie sous certaines conditions, le contrat autonome est un programme qui exécute automatiquement ces conditions. Les avantages d’un tel système sont immenses : rapidité, économie, sécurité, impartialité et transparence. Evidemment, pour s’exécuter, un contrat autonome doit être « connecté » au monde réel pour prendre en compte les conditions de son exécution et aussi pour imposer le résultat voulu.

Les contrats autonomes sont mis dans un registre décentralisé, public et sécurisé (similaire au « block chain » du Bitcoin), ils seront chiffrés pour leur confidentialité. Ce nouveau type de contrat ne s’applique évidemment pas à tous les domaines.

Les possibilités d’utilisation se concrétiseront avec la prolifération des objets connectés, des objets intelligents ou de la technologie portable (« wearable computing »). Nos voitures sont déjà équipées de clés (utilisant la cryptographie) qui pourraient être activées (et désactivées) en fonction de paiements faits à une adresse Bitcoin définie (par un contrat de location ou un contrat de financement du véhicule).

Plus généralement, pour fonctionner, les contrats autonomes ont besoin d’une monnaie telle que le Bitcoin, d’abord pour automatiser les transferts financiers et ensuite pour réguler l’exécution de ces contrats. Un contrat est composé d’un ensemble d’instructions, chaque instruction exécutée consommera des (maigres) ressources et demandera des frais en proportions. Le système sera autorégulé (comme le Bitcoin) : les frais récoltés pour l’exécution des contrats seront versés aux nœuds du réseau (aussi appelés « mineurs » qui valident les transactions et sécurisent le système).

Les contrats autonomes ont leur propres limites, ils seront plus difficilement applicables s’ils doivent se baser sur des objets non connectables ou sur des conditions nécessitant un jugement humain.

Pour ce dernier cas, des solutions intelligentes existent néanmoins. A titre d’exemple, imaginons un contrat d’emploi :

« Si Pierre a fait le travail A, il sera payé X par son Employeur »

La difficulté réside dans l’appréciation de la réalisation du travail A et éventuellement de sa qualité. Dans la majorité des cas, l’entente entre Pierre et son Employeur ne pose pas de problème mais par prudence Pierre et son Employeur peuvent désigner Jean, un tiers de confiance qui interviendra en cas de litige. Le contrat devient :

« Si Pierre a fait le travail A, il sera payé X par son Employeur. Si les parties sont en désaccord sur la réalisation de A alors ils s’en remettent à Jean. »

Jean est un arbitre, il n’est pas le juge du tribunal, en cas de désaccord il ne sera pas nécessaire de faire appel à la justice avec tous les délais et coûts associés. Le pseudocode du contrat autonome d’emploi serait :

SI [ (Employeur DIT « le travail A est fait ») OU (Jean DIT « le travail A est fait »)
ALORS ENVOYER(X à Pierre) ]

SINON SI [ (Pierre DIT « le travail A n’est pas fait ») OU (Jean DIT « le travail A n’est pas fait)
ALORS ENVOYER(X à l’Employeur) ]

En terme de contrat autonome : (Personne DIT « blabla ») est simplement la vérification d’une signature électronique, c’est-à-dire que le message « blabla » a été soumis et signé avec la clé publique de Personne. Le contrat autonome est activé dès que l’Employeur envoie la somme X au contrat, ensuite si l’Employeur signe et envoie le message « le travail A est fait » alors le contrat est exécuté et Pierre est automatiquement payé. Si en définitive, Pierre déclare ne pas avoir fait le travail alors la somme X retourne à l’Employeur. Et s’il y a un désaccord alors c’est Jean qui tranche et débloque la somme X (toujours en signant et en envoyant le message adéquat au registre décentralisé).

Le rôle du tiers de confiance est limité, parfaitement défini et demande beaucoup moins de moyens qu’un appel aux Juges et Tribunaux. Le tiers de confiance a simplement besoin d’une signature électronique et d’une connexion internet.

Les contrats autonomes peuvent traiter des situations complexes, et par exemple, prévoir qu’une majorité des tiers de confiance votent en cas de litige. Par exemple, l’approbation de 2 tiers de confiance parmi 3 personnes de confiance désignées peut faire partie intégrante du contrat. Les tiers de confiance jouent le rôle de juges désignés, si besoin ils peuvent être spécialisés dans le domaine du contrat concerné.

On peut imaginer la constitution de sociétés de tiers de confiance spécialisées ou généralistes. Ce sera aux rédacteurs des contrats autonomes de choisir les tiers de confiance adéquats.

En allant encore plus loin, on peut imaginer la création de véritables organisations automatisées (aussi appelées organisations autonomes décentralisées). Il s’agit d’utiliser les technologies des contrats autonomes pour construire des organisations qui existeront uniquement sur Internet et qui contrôleront néanmoins des moyens financiers. Ce type d’organisation pourra, par exemple, rémunérer des travailleurs réalisant des tâches bien réelles. Cela commence à ressembler à de la science-fiction : qui, aujourd’hui, peut imaginer travailler pour une machine et être payé par elle ?

 Ce texte est, entre autre, issu d’un article publié par Vitalik Buterin sur blog.ethereum.org
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Bitcoin et ses extensions révolutionnaires

BitcoinBeaucoup ont entendu parler du Bitcoin pour la première fois en 2013, en tant que simple monnaie virtuelle et parce que le cours a dépassé les 800€. Mais la réalité du Bitcoin est beaucoup plus importante que cela. À la base, Bitcoin est une nouvelle technologie qui permet à tout le monde d’arriver à un consensus sur la possession d’une chose, et ce, sans nécessité une tierce partie. Cela signifie qu’un organisme central (comme une banque dans le cas de la monnaie) n’est plus nécessaire. Il existe de nombreuses applications de cette technologie, et la monnaie bitcoin n’est que la première des révolutions à venir.

En partant de la technologie Bitcoin, un grand nombre de nouvelles possibilités s’ouvrent à nous. On parle, entre autre, de « propriété intelligente » (smart property). Par exemple, si nous pouvons avoir un registre décentralisé qui établit à qui appartient quel actif (ou action), alors pourquoi avons-nous encore besoin des bourses ou des notaires ou des avocats ? Si nous pouvons avoir un consensus mondial sur qui est propriétaire d’un nom de domaine ou d’une adresse e-mail , alors pourquoi avons-nous encore besoin des versions centralisés de ces services ? S’il est possible de créer un marché mondial où les acheteurs et les vendeurs peuvent se trouver de manière décentralisée, alors pourquoi avons-nous encore besoin d’utiliser eBay ? Ce ne sont que quelques-unes des possibilités que les entrepreneurs cherchent réaliser à partir de la technologie du Bitcoin.

Quelques extensions de la technologie du Bitcoin :

  • Les pièces de couleur (Colored Coins) : il s’agit d’un protocole qui se superpose au Bitcoin et dont l’idée principale est que nous pourrons donner des attributs à certains bitcoins. Ces attributs peuvent par exemple représenter des actifs réels.
  • Mastercoin : est un projet semblable à celui des pièces de couleur, mais en utilisant d’autres moyens.
  • Open Transactions : ce projet était en développement avant l’essor du Bitcoin. L’objectif est de décentraliser la finance en permettant à quiconque d’émettre des monnaies et divers actifs financiers qui sont sécurisés via cryptographie. Toute personne sera en mesure de créer des jetons numériques qui représentent une valeur réelle, mais l’une des caractéristiques les plus innovantes de ce système est que les émetteurs des jetons numériques ne seront pas en mesure de modifier le registre de leur monnaie (ou actions).
  • Protoshares : une autre approche similaire au Mastercoin. L’idée est que toute personne qui possède des Protoshares recevra également une participation dans les sociétés décentralisées autonomes qui sont créés par Invictus Innovations.
  • Ethereum : se présente comme une plateforme pour gérer des contrats intelligents, des devises personnalisées ou «pièces de couleur», les instruments financiers dérivés, et beaucoup plus. L’innovation réside dans l’intégration d’un langage de programmation qui permettra d’aller plus loin.

La technologie du Bitcoin permet de créer des sociétés autonomes décentralisées. Il s’agit d’utiliser des registres décentralisés (comme le blockchain du Bitcoin) pour créé des services décentralisés qui n’ont donc plus besoin d’une autorité de contrôle et de vérification. C’est révolutionnaire à plus d’un titre ! En plus du Bitcoin, le Namecoin est un autre exemple de société autonome décentralisée active (utilisée pour la gestion des noms de domaine .bit).

A lire, article du Huffington Post (29/01/2014) : Le Bitcoin n’est pas une monnaie, mais notre avenir à tous.

Autre article sur lesechos.fr (11/02/2014) : Bitcoin : bien plus qu’une simple monnaie d’échange ou une valeur refuge

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